Ces jardiniers audacieux redécouvrent une graine oubliée après août : « Personne n’en voulait, et pourtant, elle résiste à la sécheresse et nourrit une famille entière en automne »

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Dans un coin reculé de la campagne française, une graine longtemps délaissée renaît et change la donne des récoltes d’automne.

Dans un coin de campagne où le maïs ne pousse plus qu’à moitié, une vieille céréale fait parler d’elle à nouveau. La graine de sorgho, longtemps jugée inutile, revient sur le devant de la scène, portée par des jardiniers qui préfèrent la terre sèche aux subventions perdues. On la croyait réservée aux terres africaines. Elle s’enracine désormais, sans bruit, dans nos jardins et nos assiettes.

La revanche d’une plante discrète

Personne ne regardait le sorgho il y a encore quelques années. Trop rustique, pas assez rentable, pas dans les habitudes. Puis les étés ont changé. La pluie s’est faite rare, et les terres ont commencé à parler une autre langue. Une langue sèche, exigeante, qui ne pardonne plus aux plantes fragiles. La graine de sorgho, elle, s’en moque. Elle pousse où d’autres s’arrêtent. Elle supporte la chaleur, s’accommode des sols pauvres, réclame peu et donne beaucoup.

Jean Dupont, petit agriculteur près d’Agen, n’en revient toujours pas. Il a tenté le sorgho presque par dépit, après avoir vu ses champs de maïs brûler deux années d’affilée. « On m’a dit que ça ne marcherait jamais ici. Et pourtant, c’est la seule chose qui a survécu à août dernier. » Ses voisins ont commencé par se moquer. Aujourd’hui, ils viennent lui demander des conseils. Il a réussi à nourrir sa famille et à vendre quelques sacs en surplus. Tout ça avec une culture que les coopératives ne prennent même pas au sérieux. Du moins, pour l’instant.

Graine de sorgho : une céréale qui coche toutes les cases

La graine de sorgho ne fait pas de bruit, mais elle aligne les bons points. Pas besoin de fertilisants hors de prix ni de produits chimiques. Elle se débrouille toute seule. Les insectes l’évitent, les maladies aussi. Et pendant qu’elle pousse, elle améliore le sol au lieu de l’épuiser. Même les vers de terre semblent l’apprécier.

Mais ce n’est pas qu’une histoire d’agronomie. Le sorgho se cuisine. Eh oui, il se mange. En galettes, en salade, en semoule, en pain même. Riche en protéines, en fer, sans gluten, avec une texture un peu croquante qui surprend au début, puis qui devient familière. Les enfants de Jean y sont venus naturellement. « C’est bon et ça cale », dit sa fille en riant. Elle en réclame dans ses lunch box.

Certains en font même des boissons fermentées, façon bière artisanale. Le champ s’ouvre, doucement, à ceux qui osent réinventer. Et pendant ce temps, d’autres continuent d’arroser leurs tomates trois fois par jour, sans se douter qu’une graine de sorgho pourrait leur simplifier la vie.

Changer les habitudes, une assiette à la fois

Le vrai défi, ce n’est pas de cultiver le sorgho. C’est de faire oublier son image de céréale pauvre. Beaucoup l’associent encore à des périodes de famine, à des pays lointains, à une agriculture de survie. On oublie qu’ici aussi, la survie devient une affaire sérieuse. Jean en est conscient. Il organise des dégustations sur les marchés, des ateliers cuisine dans les écoles. « Si les gens goûtent, ils adoptent. Mais il faut qu’ils goûtent. »

Le bouche-à-oreille commence à faire son effet. Des restaurateurs s’y intéressent. Des boulangers testent des mélanges. La graine de sorgho circule à nouveau, non pas par nostalgie, mais parce qu’elle répond à une réalité bien ancrée : il faut cultiver autrement. Et manger autrement.

Le climat ne nous attendra pas. Le sorgho, lui, est déjà prêt. Il pousse là où d’autres renoncent, et il pourrait bien, à sa manière discrète, bousculer nos habitudes. Pas comme une mode passagère. Plutôt comme une évidence qu’on aurait oubliée, et qui revient au moment où on en a le plus besoin.

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